Mais parmi tous les crimes, il y en a de plus abominables : tuer, détruire, dominer au nom de Dieu, crier que c'est la parole ou la volonté de Dieu, quel que soit le nom avec lequel il est prononcé, ou dire que Dieu a déterminé au travers d'un livre qu'il en soit ainsi. Ce sont les lois civiles et les dogmes religieux qui nous séparent des valeurs éthiques de la dignité en interprétant mal les concepts et les mots. Un exemple est le soi-disant Jihad ou « guerre sainte », qui a causé tant de dommages à la société et à sa religion, l'Islam.

Le Jihad est un concept du Tasawwuf, du mysticisme islamique, appelé « Soufisme », et signifie « effort » : l'effort qui est fait intérieurement sur le chemin vers Dieu. Le Jihad ou la guerre sainte est une guerre intérieure qui conduit l'être humain à défier son égoïsme. Il est écrit qu'un jour le Prophète (que le salut et la paix soient sur lui) a dit: « Nous revenons d'une petite guerre et nous nous dirigeons vers une grande guerre ». Alors quelqu'un a demandé : « Quelle est cette grande guerre ? ». Et il a répondu : « Il s'agit de la grande guerre que chacun doit entreprendre contre son propre égoïsme ». Ainsi, comme le souligne Shaikh Khaled: « La grande guerre sainte n'est pas destinée à étendre la foi de l'Islam sous la domination d'un tyran. Le grand djihad (Al jihad al-akbar), est le djihad des âmes qui remonte aux origines de l'homme ».

Quand l'être humain est devenu conscient de tout ce qu'il a reçu de Dieu - l'intelligence et la connaissance qui l'ont emmené à comprendre sa propre responsabilité, et son ignorance devant l'univers avec lequel il se sent cependant uni -, c'était quand il a conclu qu'il avait le pouvoir de choisir son destin, de choisir entre le bien et le mal. C'est le clou islamique du Jihad où l'on reconnaît que cette grande guerre sainte n'est rien d'autre que la lutte de l'être humain contre lui-même, contre son ego. C'est pourquoi le Soufisme dit: « Vous devez manipuler la vie avec vos mains, mais ne jamais la laisser pénétrer dans votre cœur, parce que vos mains peuvent être lavées, mais votre cœur ne le peut pas ».

Mais qu'est-ce que le Tasawwuf ? Quand on interroge un enseignant soufi sur ce qu'est le Tasawwuf, il répond habituellement ainsi : « Ce qui se passe dans votre tête, abandonnez-le ; ce que vous avez en main, offrez-le ; ce qui va vous arriver, ne le fuyez pas ».

Ces beaux mots montrent que l'Islam est une religion qui aspire à fondre la spiritualité de l'homme et de la femme dans leur humanité par le don et la soumission aux autres. L'Islam, en son noyau, ne condamne aucune religion ; au contraire, il a comme père Abraham, qui est le père des peuples juif et chrétien, et considère Jésus comme le deuxième plus grand prophète. C'est ce qu'on lit dans la tradition musulmane : « Jésus était le divin qui parlait dans le divin, l'âme divine révélée à notre parole ».

Le chemin mystique de l'Islam est un chemin de fraternité qui a été éclipsé par l'extrémisme d'un groupe de personnes. Mais cette interprétation erronée ne peut conduire à condamner les musulmans qui vivent ou tentent de vivre le chemin de l'Islam. Les paroles de Muhammad (sur lui le salut et la paix), vont directement à l'intérieur de l'homme et de la femme pour qu'ils vivent avec l'autre dans la mutuelle connaissance et la liberté. Shaykh Khaled Bentounés, un maître soufi, l'exprime ainsi : « Les dogmes religieux ont privé l'homme de toute référence intérieure à la spiritualité ; la religion est devenue une idéologie, un instrument de manipulation des masses ». La religion ne peut et ne doit pas être une idéologie ou une doctrine, car elles mènent au meurtre et à l'esclavage.

Le mysticisme islamique à travers le Jihad invite à une action de renouvellement qui a comme point central de s'en prendre au moi (à l'ego), jamais aux créatures ; jamais avec des actes d'agression contre la société. Le Jihad nous apprend qu'en gagnant jour après jour cette guerre contre soi-même, la vie s'approfondit en intensité, car : « Celui qui est généreux se fait à lui-même un bien immense, car il augmente sa propre joie de vivre ».

L'Islam ne condamne pas les femmes, au contraire il les valorise en les considérant comme la partie féminine de Dieu car elles portent dans leur ventre le don de créer. Le vêtement imposé aux femmes est une incompréhension des paroles du Prophète (que sur lui soient le salut et la paix), qui dit : « Dieu ne regarde pas votre aspect extérieur ou vos actions, il vous regarde dans le cœur ».

L'Islam est construit sur la paix du cœur ; un croyant ne doit pas séparer sa foi de ses actions, car chaque acte comporte un devoir et une responsabilité envers les autres. L'Islam ne condamne aucune religion, au contraire, il exalte les grands prophètes qui leur ont été envoyés qu'il appelle Rasûl. On croit que chaque prophète envoyé apporte une nouvelle formule et fournit ainsi un message différent. Le Prophète (que la paix et le salut soient sur lui) a dit: « Personne n'est supérieur à l'autre ; vous êtes tous des égaux, comme les aiguilles d'un même peigne ». Il est faux de juger l'Islam à partir d'actes terroristes commis par un groupe d'hommes qui tentent d'imposer leurs idées, qui ne sont pas celles du Prophète, et qui se disent jihaidista, salissant la belle signification de ce concept.

Le Jihad est une guerre spirituelle vécue de deux manières : à travers la lutte intérieure contre son propre égoïsme ; à travers une lutte vécue en tant que société pour éliminer la pauvreté et les crises économiques. Ces sens l'éloignent de la mort et des armes, éléments  avec lesquels il est  apparenté aujourd'hui.

Un jihaidista est celui qui se bat dans son être intérieur et sert l'humanité en son action  sociale, en supprimant dans son intériorité jour après jour, et en ayant l'amour comme seule arme, tout désir de richesse et de pouvoir qui mènent l'homme et la femme à soumettre ou à nuire à leurs semblables ; c’est seulement avec l'amour qu’on peut démasquer le mensonge caché dans une justice manipulée.

La vraie justice doit être fondée sur la dignité et préserver celle de tout être humain et non servir à protéger les lois et les dogmes, parce que rien n'est plus précieux que la dignité qui consacre la vie humaine. « Aide à ton frère opprimé ou oppresseur ». A ce propos ses compagnons lui ont répondu: « Nous comprenons bien que nous devons aider les opprimés. Mais, comment pouvons-vous aider l'oppresseur? ». Il leur répondit: « En arrêtant sa main, en l'empêchant de faire le mal ».

Le Jihad invite tout être humain à accepter l'autre, à le valoriser, à prendre soin de lui, en se dépouillant de son propre égoïsme. C'est une porte ouverte vers la liberté qui conduit chacun de nos actes à prendre soin de l'autre, que nous le connaissions ou pas ; sans nous soucier que ses croyances et ses idéologies soient d'accord ou non avec les nôtres. Il ne faut pas oublier que ce qui est aujourd'hui connu sous le nom du Jihad, est une distorsion de son sens vrai, une mauvaise interprétation qui conduit à l'extrémisme autant celui qui s'y engage, que celui qui discrimine l'autre parce qu’il appartient à une religion dont il n'a pas une connaissance claire.

(Extraits et arrangement aux bons soins de Jpic-jp.org. Voir l'originel en https://sedosmission.org/article/la-yihad-la-verdadera-guerra-santa/ )