« Il faut abandonner toute forme de nostalgie, se concentrer sur la formation, prendre conscience des temps nouveaux et dépasser la logique postmoderne du provisoire ».
Les questions agitent l'esprit tandis que les réponses risquent de nous endormir, surtout lorsqu'elles sont conçues pour anesthésier la fatigue de la pensée face à la complexité des défis actuels. Bienvenue donc dans le débat qui se dessine depuis quelques semaines. À l'insignifiance chrétienne, entendue non pas tant au sens sociologique que comme l'incapacité des symboles et des mots chrétiens à toucher l'imagination, à percer le cœur et à marquer la vie de nos destinataires, j'ai récemment souhaité dédier un texte de théologie publié par St Paul, estimant que la question déjà posée par Karl Rahner il y a quelques décennies devait être placée au centre de la réflexion théologique et de l'action pastorale : comment est-il possible de faire aujourd'hui l'expérience du Dieu de Jésus-Christ dans une société qui l'a marginalisé ? C'est une question que le christianisme doit commencer à se poser.
En effet, il ne sert à rien de s'attarder sur les analyses concernant le changement d'époque, la fin du christianisme, la disparition du christianisme sociologique et l'avancée du sécularisme, si l'on n'a pas le courage de faire un pas de plus, que l'on peut formuler comme suit : si la culture occidentale n'est plus accueillante à l'annonce chrétienne, il est tout aussi vrai que le christianisme a depuis longtemps cessé d'être culturel, d'être capable non seulement d'écouter mais aussi d'interpréter les défis du contexte, dans un dialogue libre de manies de supériorité morale et d'éléments cléricaux.
Le christianisme semble être marqué par une sorte de « culture du déclin ». Récemment, le président de la Conférence épiscopale italienne, le cardinal Zuppi, en a parlé en disant : « On ne peut pas gérer le présent avec une culture du déclin, comme s'il s'agissait seulement de rassembler des forces diminuées, de réduire l'espace et l'engagement, ou de lancer des appels angoissés au combat ».
La culture du déclin, qui nous empêche d'avoir des langages, des propositions et une posture pour habiter la culture d'aujourd'hui, se manifeste de nombreuses manières, et en mentionner quelques-unes signifie aussi identifier celles qui peuvent devenir des lieux de redémarrage, si nous nous y consacrons avec une réflexion théologique et pastorale passionnée.
Avant tout, il faut souligner le risque d'une accoutumance victimaire à la question du nombre, qui génère souvent une réaction hâtive, dépourvue d'une vision ecclésiale et pastorale clairvoyante : ainsi, les quelques forces restantes s'unissent ou bien nous nous réfugions derrière une attitude défensive, en nous limitant à préserver ce qui existe. Peut-être faut-il plutôt avoir le courage de prendre au sérieux la disproportion qui existe entre la façon dont nous pensons et vivons encore la paroisse et le nombre décroissant de prêtres et d'agents pastoraux, dans un contexte devenu mobile, pluriel et multiculturel.
Cette situation ne laisse pas de place ni d'énergie pour penser à une « pastorale du seuil », centrée sur une annonce de l'Évangile qui puisse intercepter le lointain et dialoguer avec les questions de notre temps et les défis culturels, peut-être même en stimulant le débat parmi ceux qui sont engagés de diverses manières dans les espaces publics de la ville, de la politique et de la société civile.
La question implique naturellement une réflexion sur le ministère ordonné, une nouvelle lecture de l'institution paroissiale, quelques questions sérieuses sur la configuration juridique actuelle et le droit canonique, afin d'imaginer une nouvelle forme et une nouvelle présence de l'Église en dialogue avec le territoire. Cependant, on a l'impression que, même en ce qui concerne la proposition, le christianisme procède souvent avec des langages, des formules et des pratiques qui ne tiennent pas compte du fait que l'imagerie intérieure et conceptuelle de nos contemporains a changé au cours des dernières décennies.
On peut continuer à parler de salut, de bonheur, de vie humaine, de mort et de résurrection, mais en risquant de ne plus rien communiquer si l'on ne tient pas compte des changements anthropologiques, de la diversité et de la pluralité des significations que chacun donne à sa propre expérience de vie, de la recherche post-moderne d'un bien-être psycho-physique et spirituel détaché de la relation avec Dieu et de la foi, par contre, en l'intelligence artificielle.
Les paroles de l'événement chrétien - on pense, par exemple, à la profession de foi lors du proche anniversaire de Nicée - ne devraient-elles pas être traduites et proposées à nouveau à travers une nouvelle médiation linguistique et conceptuelle ? Enfin, en ce qui concerne les défis de la culture et les défis pastoraux, l'impression est que même le christianisme avance dans le sillon postmoderne de la logique du provisoire : il manque de vision et de pensée à long terme, il avance par à-coups et par fragments.
En ce sens, la culture du déclin s'exprime dans le repli sur des formes de religiosité intimistes et, plus souvent encore, sur des formes de dévotion qui dispensent de l'effort de réflexion et du poids des choix novateurs et courageux. Le chercheur Sequeri en a parlé comme d'une « retraite dans la pure dévotion de gestes et d'images vaguement liés au mystère chrétien », tandis que le théologien Righetto a parlé à juste titre du « bric-à-brac » spirituel que l'on trouve dans les librairies religieuses et qui génère une sorte de « sous-culture » catholique.
Il y a certainement un investissement qui fait défaut et si nous parlons d'une relation dialogique avec la culture, l'investissement principal devrait être dans l'éducation. Alors que le sécularisme a désormais transformé l'imagerie intérieure de la vie des gens, modifiant les symboles à travers lesquels ils interprètent la vie et habitent le monde, le souci de la formation et de la préparation culturelle, biblique et théologique des laïcs et des prêtres n'est toujours pas assumé comme un engagement incontournable des programmes pastoraux.
Il y a quelques jours, le théologien Giuseppe Lorizio est revenu sur le sujet en affirmant que le croyant ne peut pas ignorer, et doit même interpréter et aborder une culture comme la nôtre qui se manifeste sous la forme d'un « polythéisme » de connaissances et de valeurs, dans une grande variété et pluralité de visions. Tandis qu’on considère qu'il est plus urgent de répondre aux besoins d'aujourd'hui que d'investir pour demain. En ce qui concerne la formation culturelle, l'ancien et toujours nouveau préjugé continue à peser lourd, selon lequel il ne sert à rien d'étudier et d'approfondir, car il suffit d'être proche des gens, de dire la messe et de présider quelques actes de dévotion.
Le risque d'auto-marginalisation du christianisme devient plus que concret, que l'on se réfugie avec nostalgie dans l'idéalisme du bon vieux temps ou que l'on s'enferme dans des formes moralisantes et dévotionnelles. Quelque chose peut changer si et quand nous aurons le courage de mettre la main - sans peur et sans opposition idéologique - sur une nouvelle vision ecclésiale. Mais cela ne se fera pas en continuant à miser sur une vision pastorale générale, sans faire l'effort de penser - et de penser théologiquement - à l'avenir du christianisme.
Laisser un commentaire