Remarque. Cet article est traduit de l’anglais et en anglais, « arms » signifie à la fois bras et armes. Lorsque la vente d'armes d'un million de dollars est à la porte, les violations des droits de l'homme et les crimes de guerre volent par la fenêtre. Alors que les Nations Unies (ONU) ont souhaité une réaction au coup d'État militaire au Myanmar, la Chine et la Russie, deux membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU), ont refusé, exerçant leur veto, de soutenir une déclaration condamnant la prise du pouvoir par l'armée, une déclaration collective qui demandait le consensus des 15 membres du CSNU.
Les deux grandes puissances ont longtemps entouré le Myanmar de leurs armes et de leurs bras protecteurs en raison de relations politiques, économiques et militaires de longue date avec cette nation en difficulté de l'Asie du Sud-Est. La Russie et la Chine se sont souvent soutenues mutuellement (« tu me grattes le dos, je vais gratter le tien »), même si elles ne votent pas toujours de façon unanime.
Le plus important est peut-être le fait que la Russie et la Chine sont deux des principaux fournisseurs d’armes du Myanmar et protégeront donc le pays de toute forme de sanctions militaires ou économiques de l’ONU.
Bien qu’il ne publie pas officiellement les chiffres de son budget militaire annuel ni ne fournisse des informations sur ses dépenses en achat d’armes, le Myanmar a acheté pour plus de 2,4 milliards de dollars en armes entre 2010 et 2019, selon la base de données du Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI). La Chine y était pour environ 1,3 milliard de dollars, la Russie pour 807 millions de dollars, l’Inde pour 145 millions de dollars et la Corée du Sud pour 90 millions de dollars.
Siemon Wezeman, chercheur principal dans le programme d'armement et de dépenses militaires au SIPRI, a déclaré que ces achats d'armes comprenaient des navires de guerre, des avions de combat, des drones armés (UAV), des véhicules blindés et des systèmes de défense aérienne en provenance de Chine, tandis que la Russie fournissait des avions de combat et des hélicoptères de combat.
L'Inde, actuellement membre non permanent du CSNU, a fourni un sous-marin d'occasion, le premier grand sous-marin pour le Myanmar, ainsi que du matériel et des missiles pour les navires de guerre construits au Myanmar.
« L'Inde est un fournisseur d'armes plutôt nouveau et semble avoir pour objectif de réduire les liens du Myanmar avec la Chine et a, dans le passé, exprimé des inquiétudes concernant l'influence chinoise au Myanmar et pour les (potentielles) installations et bases militaires chinoises au Myanmar », a déclaré Wezeman. L'Inde et la Chine, deux puissances nucléaires, ont eu plusieurs affrontements militaires dans leurs différends frontaliers en cours le long de la ligne de contrôle effectif (LAC) dans l'Himalaya.
La Corée du Sud, la Biélorussie et Israël comptent parmi les autres fournisseurs d'armes du Myanmar, a rappelé Wezeman.
Plusieurs membres de l’Union européenne (UE) ont également fourni des équipements considérés comme des « armes majeures » par le SIPRI, malgré les sanctions de l’UE, qui incluent une interdiction apparemment forte de fournir du matériel ou de soutenir l’armée du Myanmar.
Le Dr Natalie Goldring, représentante de l'Institut pour la diplomatie du désarmement à l'ONU et chercheur principal à l'Université de Georgetown, a déclaré à IPS que toute tentative d'imposer des sanctions par le biais du Conseil de sécurité de l’ONU devrait surmonter les objections des deux principaux fournisseurs d'armes du Myanmar, tous deux ayant droit de veto au Conseil de sécurité.
« La Chine a déjà bloqué une déclaration du Conseil de sécurité de l'ONU qui aurait condamné le récent coup d'État militaire. Cette action suggère qu'ils bloqueraient également toute tentative d'imposer des sanctions économiques ou militaires ». Avant le coup d'État aurait été le bon moment pour que les pays cessent de fournir au Myanmar des armes militaires avancées, a-t-elle déclaré, ajoutant qu' « il vaut toujours mieux arrêter les transferts d'armes maintenant que d'attendre plus tard ».
«Le moment est venu pour les fournisseurs d’armes d’accepter le fait que la durée de vie utile de ces armes peut facilement s’étendre au-delà du temps de vie du régime des gouvernements auxquels les armes sont vendues ou données. En tant que cinq des six principaux fournisseurs d’armes au monde, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU (États-Unis, Russie, France, Chine et Royaume-Uni) ont une responsabilité particulière à cet égard », a déclaré le Dr Goldring.
Dans une déclaration condamnant le coup d'État, le président américain Joe Biden a déclaré : « Les États-Unis ont supprimé les sanctions contre la Birmanie (les États-Unis ont longtemps refusé de reconnaître le changement de nom du Myanmar) au cours de la dernière décennie sur la base des progrès vers la démocratie ». « La remise en cause de ces progrès nécessite un examen immédiat de nos lois et autorités en matière de sanctions, suivi de mesures appropriées », a-t-il ajouté. « Les États-Unis défendront la démocratie partout où elle sera attaquée ».
Un porte-parole du département d'État, Ned Price, a déclaré aux journalistes le 3 février que les États-Unis ont fourni près de 135 millions de dollars d'aide bilatérale à la Birmanie au cours de l'exercice 2020. « Je dois mentionner que seule une partie de cela, une très petite partie, est une aide au gouvernement. Mais nous allons passer le tout en examen ». La grande majorité irait en fait aux Rohingyas, à la société civile et non aux militaires birmans, a déclaré Price.
Louis Charbonneau, directeur auprès de l’ONU pour Human Rights Watch, a déclaré que l’échec épouvantable du Conseil de sécurité à s’attaquer aux terribles violations des droits de l’homme au Myanmar avait montré aux militaires qu’ils pouvaient faire ce qu’ils voulaient sans conséquences graves. « Cette approche devrait prendre fin maintenant -, a-t-il ajouté-. Le Conseil de sécurité devrait exiger la libération immédiate de tous les dirigeants politiques et militants détenus et le rétablissement d'un régime démocratique civil. Des sanctions ciblées devraient être imposées aux chefs militaires responsables ».
Pendant ce temps, les ministres des Affaires étrangères du G7 - Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Royaume-Uni des États-Unis-, ainsi que le haut représentant de l'Union européenne, ont condamné à l'unanimité le coup d'État au Myanmar.
« Nous sommes profondément préoccupés par la détention de dirigeants politiques et de militants de la société civile, y compris la conseillère d'État Aung San Suu Kyi et le président Win Myint, et par le ciblage des médias ».
« Nous appelons les militaires à mettre immédiatement fin à l'état d'urgence, à restaurer le pouvoir du gouvernement démocratiquement élu, à libérer tous ceux qui sont injustement détenus et à respecter les droits de l'homme et l'état de droit. Les résultats des élections de novembre doivent être respectés et le Parlement doit être convoqué le plus tôt possible », ont déclaré les ministres du G7 dans un communiqué.
Appelant à la démilitarisation du Myanmar, le cardinal Charles Bo, archevêque de Yangon et président de la Fédération des conférences épiscopales asiatiques (FABC), a déclaré que la guerre est le langage de la mort. « Les guerres civiles sont un refus de reconnaître l'humanité de nos frères et sœurs. La violence n'engendre jamais la paix. La guerre nie l'harmonie nationale. Les fruits des conflits sont l'amertume, les divisions et les blessures qui mettent des années à guérir. Cherchez l'unité, oui, mais pas par la peur ou par la menace ».
Parlant de militarisation, Wezeman a déclaré que le Myanmar a commencé, ces dernières années, à moderniser ses forces armées de manière plus sérieuse, en acquérant des avions de combat avancés (MiG-29, SDu-30MK et JF-17), des entraineurs d’avions de base et avancés d'entraînement (K-8, Yak-130 et G-120TP) et divers véhicules blindés pour remplacer ou compléter ceux en service.
Le Myanmar a également acquis plusieurs types de systèmes de défense aérienne (qu’il ne possédait pas vraiment auparavant) et son premier sous-marin. Il a acquis de nouveaux navires de guerre et a commencé à construire des navires de guerre de conception locale (mais soupçonné de s'appuyer fortement sur l'aide chinoise pour la conception et l'utilisation d'armes, de capteurs et de moteurs importés). En général, il semble que le Myanmar s'est engagé dans la construction de forces armées plus capables de contrer les différentes forces rebelles au Myanmar, mais aussi d'autres États. Actuellement, par rapport à ses voisins - la Chine et l'Inde, et même la Thaïlande - les forces armées du Myanmar opèrent avec moins d'armes majeures et des systèmes d'armes moins avancés, a déclaré Wezeman.
Voir, China & Russia Throw Protective Arms around Myanmar
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